De récentes découvertes viennent bouleverser tout ce que l’on croyait savoir sur la longévité des baleines franches. Grâce à une étude menée par l’Université d’Alaska Fairbanks, relayée par ScienceDaily (source : https://www.sciencedaily.com/releases/2024/12/241220153513.htm), on apprend que ces géants marins peuvent atteindre 130 à 150 ans, soit près du double des estimations précédentes.
Un âge canonique qui force l’admiration… mais aussi l’inquiétude, car cette incroyable longévité est aujourd’hui mise en péril par les activités humaines. En France comme ailleurs, cette révélation pourrait bien rebattre les cartes de la protection des mammifères marins.
Une longévité hors normes enfin révélée
Un record qui dépasse toutes les attentes
Jusqu’ici, les scientifiques pensaient que les baleines franches australes vivaient entre 70 et 80 ans. Mais selon les nouvelles données recueillies sur plusieurs décennies, certaines atteindraient 150 ans. Pour parvenir à cette estimation, les chercheurs ont utilisé une méthode inédite : l’analyse de courbes de survie, un outil statistique comparable à ceux utilisés par les compagnies d’assurance pour l’espérance de vie humaine.
Cette étude s’inscrit dans la lignée de recherches antérieures sur les baleines boréales, des cousines des baleines franches connues pour vivre plus de 200 ans. D’ailleurs, des pointes de harpons datant du XIXe siècle ont été retrouvées dans des carcasses de baleines boréales chassées récemment en Alaska.
Un savoir autochtone capital
Les chercheurs ont collaboré étroitement avec les communautés inuites d’Utqiaġvik, en Alaska, qui pratiquent encore la chasse traditionnelle. Leurs observations précieuses ont permis d’établir des parallèles entre les différentes espèces et d’éclairer les zones d’ombre de la biologie des cétacés.
Cette synergie entre savoirs autochtones et science moderne a contribué à une prise de conscience : la longévité exceptionnelle des baleines ne doit plus être sous-estimée.
Pourquoi les baleines de l’Atlantique Nord meurent si jeunes
Une espérance de vie divisée par six
Contrairement à leurs cousines du Sud, les baleines franches de l’Atlantique Nord vivent en moyenne seulement 22 ans. Très peu d’individus dépassent les 50 ans, ce qui est alarmant pour une espèce aussi proche biologiquement des baleines australes.
Selon le biologiste Greg Breed, auteur principal de l’étude, la différence ne s’explique pas par une faiblesse génétique, mais bien par des causes anthropiques : collisions avec les navires, enchevêtrements dans les filets, et manque de nourriture en raison du changement climatique.
Des survivantes traumatisées
Les baleines de l’Atlantique Nord subissent des traumatismes fréquents. Beaucoup sont blessées, certaines meurent de faim, et les jeunes ont peu de chances d’atteindre l’âge adulte. C’est un cercle vicieux, car les femelles ne mettent bas qu’un petit tous les dix ans environ. Chaque perte a donc un impact énorme sur la survie de l’espèce.
🧠 À retenir
Les baleines franches du Sud peuvent vivre jusqu’à 150 ans, tandis que leurs cousines du Nord peinent à dépasser les 22 ans. Ce fossé s’explique avant tout par l’empreinte humaine, et non par une quelconque faiblesse biologique.
Pourquoi cette découverte change tout pour leur protection
Une récupération qui pourrait prendre des siècles
Comprendre que les baleines vivent si longtemps a une conséquence majeure : leur repeuplement sera très lent. Un animal qui vit 150 ans, donne naissance tous les dix ans et transmet son savoir à sa progéniture a besoin de temps, de stabilité et d’un environnement sain.
Selon Greg Breed, « pour atteindre une population en bonne santé, avec des individus âgés et expérimentés, il faudra probablement des siècles ». Ce constat remet en question les politiques de conservation actuelles, souvent pensées à l’échelle de décennies.
La mémoire des océans
Les baleines ne transmettent pas seulement leurs gènes. Elles transmettent une culture : des itinéraires migratoires, des techniques de chasse, des réactions face aux dangers. Les individus âgés sont les piliers du savoir collectif. Leur disparition compromet l’apprentissage des jeunes et affaiblit la résilience des groupes.
La culture des baleines, comme celle des éléphants, repose sur une transmission intergénérationnelle. Sans anciens, pas d’héritage. Sans héritage, pas d’avenir.
Une réévaluation nécessaire pour d’autres espèces
Cette étude pourrait n’être que le début. Les scientifiques estiment désormais que d’autres espèces de baleines à fanons, supposées vivre 80 ans, pourraient en réalité dépasser 120 ou 130 ans. On redécouvre un monde marin oublié, décimé par la chasse industrielle avant même qu’on ait pu l’étudier correctement.
Les effets du braconnage historique, du déclin des proies, et du trafic maritime sur ces géants discrets sont encore mal connus. Il est donc urgent de réévaluer leur espérance de vie, leur rôle écologique et les menaces spécifiques qui pèsent sur chaque population.Source : Université d’Alaska Fairbanks via ScienceDaily.
Lien vers l’étude originale : https://www.sciencedaily.com/releases/2024/12/241220153513.htm